Thèse Doctorat : Résistance aux Antibiotiques des Bactéries Intestinale de l'Homme
PhD Thesis : Antimicrobial Resistance of Gut Bacteria in Humans

Prof. Corpet: Thèse microbio & Conclusion philosophique (un peu !) - Texte de la Thèse Corpet 1988 (.pdf pour imprimer)

Thèse Corpet p.0

Université Paris-Sud Année : 1988
Série Doctorat n° 95
Thèse
Présentée à l'Unité d'Enseignement et de Recherche
d'HYGIÈNE et PROTECTION de l'HOMME et de son
ENVIRONNEMENT de l'UNIVERSITÉ PARIS-SUD
pour l'obtention du grade de DOCTEUR
(Nouveau doctorat, Arrêté du 5 juillet 1984)
par

Denis CORPET

RÉSISTANCES AUX ANTIBIOTIQUES DES
BACTÉRIES INTESTINALES DE L'HOMME :
ORIGINE NON-IATROGÈNE


Soutenue publiquement le 28 novembre 1988, devant le jury suivant :
Monsieur le Professeur P. BOURLIOUX, président
Monsieur le Professeur A. ANDREMONT, rapporteur
Monsieur le Professeur P. POHL (Bruxelles), rapporteur
Monsieur R. DUCLUZEAU
Monsieur J.P. LAFONT, et
Monsieur F. RODOLPHE



A Philippe et Laurence, d'où je viens

A Florence, où je suis

A Agnès, Pascal, Meige, Cécile, Cyrille (et Guillemette), Où je vais.




REMERCIEMENTS



Monsieur P. BOURLIOUX, Professeur à la Faculté de Pharmacie de l'Université Paris-Sud, Chef du département Microbiologie et Immunologie et Chef de service à l'hôpital Vaucluse, a accepté de présider cette thèse, dont
Monsieur A. ANDREMONT, Professeur àla Faculté de Pharmacie et Assistant au service de Microbiologie Médicale de l'Institut Gustave Roussy (Villejuif) a été l'amical initiateur.
Monsieur R. DUCLUZEAU, Chef du Département de Nutrition à l'Institut National de la Recherche Agronomique,
Monsieur J.P. LAFONT, Directeur de Recherche à, la Station de Pathologie Aviaire de l'Institut National de la Recherche Agronomique (Tours), et
Monsieur F. RODOLPHE, Directeur du Laboratoire de Biométrie (Jouy en Josas), ont accepté de prendre du temps pour lire1 et juger ce travail.
Monsieur le Professeur P. POHL, Directeur du service de Bactériologie de l'Institut National de Recherche Vétérinaire (Belgique) a de plus accepté de venir de Bruxelles.
Qu'ils en soient ici très vivement remerciés.

Je remercie aussi ici tous ceux qui m'ont formé ou aidé dans mes recherches:
- Georges Bories, qui m'invita à rejoindre son équipe du laboratoire des Xénobiotiques, et qui depuis 1979 me fait confiance et m'encourage à avancer sur des chemins pourtant différents des siens, et tous les membres de ce laboratoire qui, d'une façon ou d'une autre, m'ont aidé.
- Robert Ducluzeau et Pierre Raibaud qui m'apprirent les bactéries et l'écologie, après que J.P. Laplace m'eut initié à la recherche.
- Solange Lumeau, qui a contribué efficacement à la réalisation concrète des expériences de bactériologie présentées ici.
- les stagiaires qui ont participé (manipulateurs et volontaires) aux expériences: Mireille Ambid, Martine Calmels, Marc Faget, Florence Gérard, Martine Isambart, Fréderic Legendre, Héléne Nadalin, et Christian Poggi.
- Florence Corpet, qui m'a fait comprendre la beauté et l'utilité des modèles mathématiques, et a accepté de participer comme cobaye aux expériences.
- mes maîtres de l' Institut Pasteur et de l'Institut National Agronomique de Paris-Grignon, ainsi que Monsieur Leroy, enseignant en classe préparatoire au lycée Henri IV :
ils m'ont émerveillé de biologie.

1 Merci aux lecteurs de leur indulgence pour les fautes de frappe, rares grâce à Philippe Corpet qui a tout relu avec soin. La thèse originale a été "scannée" ce qui a rajouté des fautes, notamment au niveau des accents.



SOMMAIRE
Résistance aux antibiotiques des bactéries intestinales de l'Homme :
origine non-iatrogène.



Introduction. page 5
Chapitre I. UN MODÈLE COMPLEXE. page 13
Un modèle animal : la souris hétéroxénique.

Chapitre II. ADDITIFS ET FLORE DES ANIMAUX. page 21
Utilisation du modèle hétéroxénique pour l'étude de l'effet des additifs antibiotiques donnés aux animaux d'élevage.

Chapitre III. RÉSIDUS ET FLORE DE L'HOMME. page 31
Utilisation du modèle hétéroxénique pour l'étude de l'effet des résidus antibiotiques des aliments de l'homme. Validation du modèle par une étude chez des volontaires.

Chapitre IV. UN MODÈLE SIMPLE. page 45
Un modèle animal, simplifié : la souris dixénique.

Chapitre V. DOSE MINIMALE SÉLECTIONNANTE. page 53
Utilisation du modèle dixénique pour déterminer la dose minimale sélectionnante d'un antibiotique in vivo.

Chapitre VI. MODÈLES MATHÉMATIQUES. page 65
A. Modèle mathématique du transfert des plasmides in vivo et in vitro
D. Modélisation de l'effet des antibiotiques chez les dixéniques.

Chapitre VII. BACTÉRIES RESISTANTES ET ALIMENTS page 77
Élimination des bactéries résistantes des selles par un régime stérile.

CONCLUSIONS : page 83
- Origine des bactéries résistantes de la flore de l'homme.
- Danger des antibiotiques : additifs et thérapeutiques.
- Modèles empiriques et théoriques en biologie: intérêt et limites.

CONCLUSION FINALE. page 91

Références bibliographiques. page 93
Liste des tables et figures page 103
Table des matières page 104



" L'amour, l'énergie, la matière et l'information sont les quatre choses qui font que ce monde tourne rond. Nous sommes en déficit dramatique d'amour, nous manquons d'énergie et nous allons bientôt manquer de certains matériaux, mais nous sommes complètement envahis par un excès d'information. Nous, les scientifiques, devons contribuer à cet excès.
Mais laissez-nous le faire avec amour..."
Robert A. Day [48]


Les ANTIBIOTIQUES *1, fabriqués par certains microbes, peuvent tuer d'autres microbes. Ces substances sont utilisées par l'homme pour lutter contre les bactéries pathogènes, et notre vision de la santé et de la mort a été profondément changée par nos victoires sur les maladies infectieuses.

Mais les bactéries s'adaptent *2, et l'on observe, chez certaines d'entre elles, des modifications qui les rendent résistantes à un antibiotique inhibant pourtant les autres bactéries de la même espèce. Ces résistances se transmettent au cours des divisions bactériennes (de "mère" à "fille") et, sous la pression sélectionnante d'un antibiotique, toute une population bactérienne peut devenir résistante. Certaines de ces résistances, codées par des plasmides, peuvent aussi se transmettre d'une bactérie à l'autre, même entre espèces bactériennes différentes [220]. On connaît des épidémies de plasmides, où les bactéries pathogènes ne peuvent plus être maîtrisées par les antibiotiques, laissant l'homme impuissant devant la maladie. On comprend donc la nécessité de freiner l'apparition des résistances aux antibiotiques, et de maîtriser la dispersion des plasmides codant pour ces résistances [22]. Or les antibiotiques2 sont utilisés depuis près de quarante ans en alimentation animale, en raison de la propriété qu'ils ont de stimuler la croissance des animaux. Ils sont à cet effet ajoutés à très faible dose, généralement comprises entre 5 et 50 g/tonne, comme additifs aux aliments du bétail, ce qui augmente le gain de poids journalier et diminue l'indice de consommation des animaux. L'art vétérinaire est aussi utilisateur des antibiotiques comme médicaments, pour prévenir ou guérir les infections des animaux d'élevage.
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*1 Cette introduction, ainsi que la conclusion, ont été écrites pour pouvoir être lues par toute personne cultivée.
*2 Cette partie a été publiée en 1988 dans un article de synthèse *3 de la revue Médecine et Nutrition, Vol 4, tome 24. Cette revue est difficile d'accès, et l'auteur envisage de la mettre en ligne. Voici déjà la première page [Pourquoi des bactéries résistantes dans la flore de l'Homme ? Résidus antibiotiques ou aliments contaminés]
*3 Le contenu de chaque chapitre correspondant à une publication, n'a pas été scanné ni inclus sur ce site internet: seule la première page de chaque chapitre est donc disponible "en ligne", ainsi que la conclusion dans son entier, puisqu'elle n'a jamais été publiée.




" Le chercheur choisit un thème qui lui parait relativement vierge et fécond. Pour mieux comprendre, il réduit son problème en sélectionnant un système modèle qui sera souvent très éloigné de toute situation pratique."
René Dubos [54]

CHAPITRE I : UN MODÈLE COMPLEXE.

Invention d'un modèle animal d'étude : la souris hétéroxénique.


INTRODUCTION

Les antibiotiques *1 sont utilisés à faible dose dans l'alimentation animale pour améliorer les performances zootechniques des animaux d'élevage. Mais l'un des reproches qui est fait à cette supplémentation, et qui a conduit la plupart des pays à en limiter l'emploi [237], est qu'elle risque d'augmenter la résistance aux antibiotiques des bactéries intestinales des animaux [133]. L'existence même de ce risque dans le cas de faibles doses utilisées en alimentation animale, reste cependant à démontrer [70, 168]. En effet, ni les expérimentations en étable [162], ni les enquêtes [161, 209, 228] qui ont été réalisées ne permettent d'isoler l'action de l'additif alimentaire de celle des traitements thérapeutiques [159], ou des diverses contaminations bactériennes possibles par l'éleveur, par l'aliment [96] ou par les animaux des autres lots [162],

Le seul moyen de démontrer une action de l'antibiotique utilisé comme additif, est de soustraire les animaux à leur environnement microbien, c'est à dire de les maintenir en isolateur [55]. Cela est difficile à réaliser avec les gros animaux d'élevage. C'est pourquoi nous avons pensé utiliser des souris axéniques maintenues en isolateur, chez qui nous avons implanté des flores d'autres animaux. Ce type de modèle animal, appelé hétéroxénique, a déjà été utilisé dans d'autres buts [39, 60]. Parmi les antibiotiques qui ont été utilisés en alimentation animale, les tétracyclines sont ceux qui, dans les expérimentation sur le terrain, ont entraîné le plus régulièrement une augmentation du niveau de résistance de la microflore digestive [162]. C'est pourquoi l'action de la chlortétracycline à la dose de 20 µg/ml d'eau de boisson a été testée chez des souris axéniques auxquelles on a implanté des flores complexes de nouveau-né, de veau ou de porcelet.
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*1 Le contenu de ce chapitre a été publié en 1980 dans les Annales de Microbiologie (Institut Pasteur), Vol. 131 B, p. 309-318, sous le titre: Influence de faibles doses de chlortétracycline sur la résistance à la chlortétracycline de Escherichia coli dans le tube digestif de souris axéniques hébergeant des flores complexes d'enfant, de veau ou de porcelet.
Abstract dans PubMed. Article original des An.Microbiol.80: A dynamic study of drug resistance in populations of fecal Escherichia coli from axenic mice, fed chlortetracycline continuously and associated with flora from infant, calf and piglet. scan page 309.


CHAPITRE II : ADDITIFS ET FLORE DES ANIMAUX

Utilisation du modèle hétéroxénique pour l'étude de l'effet
des additifs antibiotiques donnés aux animaux d'élevage.


INTRODUCTION

Les porcelets *1, comme presque tous les animaux d'élevage, reçoivent dans leur alimentation des concentrations sub-thérapeutiques de substances à activité antimicrobienne, pour accroître la production de protéines animales.

Cet effet des antibiotiques sur la croissance s'explique par leur action sur la microflore des animaux, puisque l'on observe pas de stimulation chez les axéniques. La microflore a une influence globalement défavorable sur les performances zootechniques des monogastriques, mais il n'a pas été possible de prouver un changement important de la composition de cette microflore sous l'effet des additifs antibiotiques. On a pu par contre montrer des modifications importantes du métabolisme de la flore sous l'influence des antibiotiques [74, 109, 251). Les principales conséquences de I'administration d'antibiotiques en faible dose aux animaux sont [31]:
(i) une épargne de nutriments, notamment des acides aminés et des sucres simples, qui sont donc disponibles en plus grande quantité pour l'hôte.
(ii) une moindre production de métabolites microbiens toxiques : ammoniaque, amines, sels biliaires modifiés, toxines bactériennes. I1 en résulte d'une part une économie importante dans la production de la muqueuse intestinale (masse plus faible et renouvellement moins rapide), et d'autre part une meilleure cinétique d'absorption des nutriments. Enfin, les synthèses bactériennes de vitamines et d'acides aminés ne profitent à l'hôte monogastrique que s'il pratique la coprophagie [31].

L'utilisation des antibiotiques a été cependant restreinte, en raison de leurs effets indésirables sur la flore digestive [227, 237]: on observe souvent une augmentation de la résistance aux antibiotiques chez les entérobactéries intestinales après l'utilisation de certains facteurs de croissance antibiotiques [132, 153, 201]. De nombreuses études ont été réalisées pour mesurer l'effet de l'administration continue de régimes antibiosupplémentés sur l'incidence des bactéries résistantes dans les selles de veaux, de porcs, de poulets et de chiens [50, 82, 85, 158, 162, 228, 254, 255], ainsi que l'effet de l'arrêt de la supplémentation [139, 140].
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*1 Le contenu de ce chapitre a été publié dans les Annales de Microbiologie de l'Institut Pasteur en 1984, 135 A, p.329-339, sous le titre : "Effet du carbadox, de la chlortétracycline, de la flavomycine et de l'olaquindox, sur la résistance aux antibiotiques des coliformes intestinaux".
Article original sur OATAO: An.Microbiol. 1984, The effect of bambermycin, carbadox, chlortetracycline and olaquindox on antibiotic resistance in intestinal coliforms: a new animal model
Abstract dans PubMed et copie première page Scan page 329: Bambermycin....


CHAPITRE III : RÉSIDUS ET FLORE DE L'HOMME

Utilisation du modèle hétéroxénique pour l'étude de l'effet
des résidus antibiotiques des aliments de l'homme,
et
Validation du modèle par une étude chez des volontaires humains.


INTRODUCTION

Des résidus 1* antibiotiques sont parfois retrouvés dans le lait ou la viande, lorsque, après un traitement antibiotique préventif ou thérapeutique des animaux, l'éleveur n'observe pas le temps de retrait prescrit par la législation. D'après les enquêtes ces résidus sont en général retrouvés à des con-centrations inférieures à 1 ppm [75, 76, 173], mais il est possible que, même à ces faibles concentrations, ils puissent avoir un effet sur la flore digestive de l'homme. Pour le législateur, qui doit fixer les limites tolérables pour les résidus antibiotiques, il serait utile de connaître la dose d'antibiotique sans effet sur la résistance des bactéries intestinales [141, 234]. Des expériences ont été réalisées avec des animaux pour répondre à ces questions. Lorsque l'on donne certains antibiotiques à des poulets ou à des porc, on provoque effectivement l'apparition d'une population de E. coli fécaux résistants. Il est cependant très difficile d'obtenir des animaux ayant au départ peu de bactéries intestinales résistantes, alors qu'ils seraient indispensables pour obtenir des résultats significatifs [168]. On ne peut travailler avec des rongeurs, car ils ont très peu de E. coli dans leur tractus digestif. Le chien a été utilisé comme modèle animal pour déterminer l'effet de faibles doses d'oxytétracycline sur la résistance des entérobactéries fermentant le lactose, mais aucun effet n'a été observé pour des doses inférieures à 10 pg/g d'aliment [215]. Or cette dose est supérieure à celle que peuvent apporter les résidus des aliments.
modele heteroxenique, Thèse Corpet
Enfin quand on donne à des volontaires humains de faibles doses d'oxy-tétracycline pendant de longues périodes [90, 135], on observe l'apparition sporadique d'entérobactéries résistantes chez certains des individus recevant 10 mg/jour d'antibiotique, mais les doses plus faibles n'ont eu aucun effet. Cette dose quotidienne, qui correspondrait à 50 ppm d'antibiotique dans 200 g de viande, est toujours nettement plus élevée que les concentrations trouvées habituellement dans les aliments.
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*1 le contenu de ce chapitre a été publié en 1987, dans la revue "Antimicrobial Agents and Chemotherapy", Vo1.31, No.4, p.587-593.
Abstract dans PubMed, l'article complet dans Antimicrobial Agents & Chemotherapy est disponible gratuitement sur le site de l'American Society for Microbiology: [Corpet, 1987, Antibiotic residues and drug resistance in human intestinal flora]


CHAPITRE IV : UN MODÈLE SIMPLE

Invention d'un modèle animal simplifié : la souris dixénique.


INTRODUCTION

Lebek *1 et Egger ont recherché dans une étude publiée en 1983 [141] la concentration minimale de tétracycline qui sélectionne un plasmide de résistance dans un modèle in vitro. Ils cherchaient à savoir si les résidus antibiotiques qui peuvent se trouver dans le lait ou la viande peuvent sélectionner des bactéries intestinales porteuse d'un plasmide de résistance. Ils ont mis simultanément en culture dans un chémostat trois clones de E. coli , dont l'un portait un plasmide de résistance, en présence de concentrations croissantes de tétracycline. Dans ce modèle simple, ils ont trouvé qu'une concentration de 0,25 µg de tétracycline par ml de milieu était suffisante pour favoriser la sélection de la souche résistante à la tétracycline.

Mais comme nous pensons que ce modèle in vitro peut ne pas refléter les conditions écologiques régnant in vivo, nous avons tenté de valider ce modèle en inoculant per os des souris axéniques avec les trois mêmes souches utilisées par Lebek et Egger. Nous étions par ailleurs intéressé de mettre au point un modèle plus simple et plus facile à reproduire à l'identique que la souris hétéroxénique, pour pouvoir étudier l'effet des antibiotiques sur les bactéries intestinales.

MATÉRIEL et MÉTHODES

Les souches nous ont été fournies par Monsieur le Professeur Lebek (Université de Berne, Suisse). Il s'agit de trois E. coli K-12 921 lac-, marquées sur le chromosome par une résistance soit à la streptomycine, soit à l'acide nalidixique, soit à la rifampicine. La souche résistante à la streptomycine n'hébergeait pas de plasmide de résistance, la souche résistante à l'acide nalidixique hébergeait le plasmide de résistance R270 codant pour les résistances à la tétracycline et aux sulfamides (du groupe Inc F II, réprimé), et la souche résistante à la rifampicine portait un plasmide "témoin" R- F' lac+, Inc F I déréprimé [141].
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*1 le contenu de ce chapitre a été publié en 1987, dans la revue : "Zentralblatt für Backteriologie Mikrobiologie und Hygiene", Series A, Vol. 264, p. 178-i84, sous le titre: Résidus antibiotiques et sélection des plasmides de résistance : le chémostat est-il un bon modèle ?"
Abstract dans PubMed. Article complet sur les archives ouvertes HAL: Corpet & Lumeau, Antibiotic residues and R-plasmid selection: are in vitro methods good models?.


CHAPITRE V : DOSE MINIMALE SÉLECTIONNANTE

Utilisation du modèle dixénique pour déterminer
la dose minimale sélectionnante d'un antibiotique in vivo


INTRODUCTION

Quelle est la dose sans effet *1 d'un antibiotique sur la. proportion de bactéries fécales portant un plasmide de résistance ? Il faut répondre à cette question pour savoir si les résidus antibiotiques qui peuvent être trouvés dans la viande ou le lait, à des doses le plus souvent inférieures au µg/g d'aliment, peuvent présenter un risque pour le consommateur. Des expériences ont été effectuées, destinées à répondre à cette question, chez des volontaires . humains et dans des modèles in vitro, mais les résultats de ces études semblent contradictoires.

Chez des volontaires, l'administration per os de 1,5 mg d'ampicilline ou de 1 mg d'oxytétracycline par jour n'a pas produit d'effet significatif sur les entérobactéries résistantes des selles [8, 32]. Quand des volontaires reçoivent de l'oxytétracycline pendant de longues périodes, on note l'apparition sporadique d'entérobactéries résistantes chez quelques individus qui reçoivent des doses de 10 mg par jour de l'antibiotique, mais les doses plus faibles n'ont pas d'effet [90]. Cependant, en raisons des contaminations bactériennes des aliments, le nombre de E. coli résistants est éminemment variable dans les selles de l'homme, pouvant chez un même volontaire passer en quelques jours d'un niveau indétectable à un niveau où les bactéries résistantes dépassent en nombre les E. coli sensibles [32, 33]. La démonstration d'un petit changement du niveau de résistance dans la microflore de l'homme sous l'effet d'une dose d'antibiotique nécessiterait donc l'étude d'un très grand nombre de personnes.

Dans un chémostat qui contient la culture continue de 3 clones de E. coli K-12 dont l'un porte un plasmide de résistance, la dose minimale sélection-nant le plasmide de résistance est de 0,25 Kg/ml [141]. Ce modèle in vitro ne prend cependant pas en compte des facteurs écologiques qui interférent in vivo : les résidus antibiotique sont absorbés et dégradés in vivo, l'anti-biotique peut modifier la microflore anaérobie stricte dominante, et les conditions écologiques sont très loin de l'in vitro (absence totale d'oxygène et faible rH, transit très lent et substrats nutritionnels limitants) [34]. On a des preuves que les bactéries se multiplient beaucoup plus lentement dans l'intestin d'un animal que dans un chémostat. Le temps de doublement, qui
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*1 le contenu de ce chapitre, regroupé avec le chapitre VI-B a été soumis à une revue pour publication (et accepté depuis la soutenance) dans la revue "Antimicrobial Agents & Chemotherapy".
Abstract dans PubMed, l'article complet dans Antimicrobial Agents & Chemotherapy est disponible gratuitement sur le site de l'American Society for Microbiology: [Corpet et al., 1989, Minimum antibiotic levels for selecting a resistance plasmid in a gnotobiotic animal model.] et sur HAL [Corpet et al., 1989, Minimum antibiotic levels for selecting a resistance plasmid in a gnotobiotic animal model.]


CHAPITRE VI : MODÈLES MATHÉMATIQUES

VI-A. Modélisation des facteurs écologiques influençant le transfert des plasmides in vitro et in vivo *

VI-B. Modélisation de l'effet des antibiotiques observé in vivo chez les dixéniques **


INTRODUCTION

Des expérimentations *1 nombreuses ont été faites pour déterminer les paramètres qui influencent le transfert des plasmides [256]. Nous nous limiterons dans ce chapitre à l'étude de l'écologie de E. coli dans le tractus digestif et dans des cultures continues anaérobies. Une revue de la littérature permet de distinguer deux catégories d'expériences : dans certaines d'entre elles, les bactéries potentiellement donneuses et receveuses sont en dominance dans l'écosystème, alors que dans les autres expériences, ces souches qui pourraient conjuguer sont limitées en nombre par une flore bactérienne dominante.

1- Bactéries potentiellement conjuguantes dominant l'écosystème.

Voici des exemples de cette catégorie d'écosystèmes : les cultures en "batch" (en milieu liquide ou sur gélose), les cultures continues (chémostats) en absence d'autres bactéries, les animaux axéniques (rongeurs, poulets, porcs) inoculés par le mélange des souches conjuguantes (voir chapitres IV et V), les très jeunes animaux, les hommes ou les animaux traités par les antibiotiques [l, 46, 231], et enfin les hommes ou les animaux sujets d'une infection entérique, souvent liée à la domination d'une entérobactérie dans l'intestin. Dans toutes ces situations écologiques, le transfert des plasmides se produit avec une grande fréquence.

2- Bactéries potentiellement conjuguantes sous-dominantes dans l'écosystème.

Voici quelques exemples de cette catégorie d'écosystème : des cultures continues (avec un milieu très dilué, un taux de renouvellement très grand et proche du lessivage, un temps d'incubation très bref [141], ou avec une flore complexe associée [79]), des animaux axéniques associés à des flores complexes exerçant un effet antagoniste sur les entérobactéries [2, 79], et les adultes sains, hommes ou animaux [257]. Dans ces écosystèmes, le transfert de plasmide est un événement rare. Cette faible fréquence de transfert pourrait être due à des inhibiteurs spécifiques du transfert, synthétisés par les bactéries anaérobies dominantes.
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* 1 le contenu de la première partie de ce chapitre a été publié en 1986, dans le Journal of Antimicrobial Chemotherapy, Vol 18, Supplément C, p.127-132.
Abstract dans PubMed. Free full paper / Article complet gratuit sur archives HAL: Corpet: Ecological factors influencing the transfer of plasmids in vitro and in vivo

** Le contenu de la deuxième partie de ce chapitre, regroupé avec le chapitre 5, a été soumis pour publication (et accepté depuis la soutenance), dans la revue "Antimicrobial Agents & Chemotherapy".
Abstract PubMed, full paper in Antimicrobial Agents & Chemotherapy, free on websites
- ASM Corpet et al. 1989, Minimum antibiotic levels for selecting a resistance plasmid in a gnotobiotic animal model, et
- HAL Corpet et al. 1989, Minimum antibiotic levels for selecting a resistance plasmid in a gnotobiotic animal model


CHAPITRE VII : BACTÉRIES RÉSISTANTES ET ALIMENTS

Élimination des bactéries résistantes aux antibiotiques
des selles de l'Homme par un régime stérile


INTRODUCTION

Les plasmides de résistance *1 sont très fréquemment hébergés par les entérobactéries fécales, chez des gens loin de tout traitement antibiotique : des souches d'E. coli résistantes aux antibiotiques sont trouvées dans 75 à 93 % des échantillons fécaux d'une population urbaine normale [8, 103, 143,,171].

Chez un même personne, le nombre de E. coli résistants dans les selles varie beaucoup dans le temps : ainsi des périodes pendant lesquelles on ne peut détecter aucune bactérie résistante dans les selles, alternent avec des périodes oú les bactéries résistantes dépassent en nombre les bactéries sensibles. Ces changements très importants des tailles des populations sont corrélés avec des changements de biotype, de sérotype et de type électrophorétique [21, 99, 32, 46]. L'origine de ces fluctuations dans les populations bactériennes est inconnue. Il est possible que les bactéries résistantes soient résidentes dans l'intestin, auquel cas les fluctuations observées seraient dues à des changement du milieu intestinal (nutriments, antibiotiques). Mais il est beaucoup plus probable que ces bactéries résistantes ne sont que transitoires, et sont éliminées de l'intestin par l'effet antagoniste de la flore dominante, auquel cas les pics de résistance que l'on observe seraient dus à des contaminations bactériennes venant de l'environnement, des personnes, de l'eau et des aliments.

Or une étude précise a démontré l'absence de transmission des E. coli entre personnes, malgré des contacts inter-personnels importants [145). Par contre, certains aliments contiennent des bacilles gram négatifs en grand nombre, dont certains sont résistants aux antibiotiques [146, 223]. Voilà pourquoi nous avons voulu étudier l'effet d'un régime pratiquement stérile sur l'excrétion fécale des bactéries résistantes chez des volontaires sains.
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*1 le contenu de ce chapitre a été partiellement publié, dans "The New England Journal of Médecine" 5 May 1988, Vol 318, N°18, p.1206-1207, sous le titre : Antibiotic resistance from food.
Ref dans PubMed, Article du New Engl.J.Med. gratuit sur HAL: Corpet, NEJM 1988, Antibiotic resistance from food (image Antibiotic resistance from food.gif )
Les données plus complètes (figure, tableau) ont été publiées en 1993 dans Veterinary Microbiology. L'article entier est disponible gratuitement sur HAL : Corpet (1993) Vet. Microbiol. 35, 199-212
Full data from this study (table, figure) have been published later. HAL Free full paper: Corpet (1993) Vet. Microbiol. 35, 199-212


CONCLUSIONS GÉNÉRALES de la THESE

(Cliquer sur ce titre pour lire la conclusion)

Prof. Corpet: Thèse & Conclusion
Fruits Légumes Denis - Corpet - Recherche - Montagne